La phalange grecque

 

 

On sait peu de choses des pratiques guerrières des régions autrefois civilisées lors de la période d'obscurantisme. En 700 av. J.-C., cependant, un nouveau système, désigné par le terme de phalange, avait été instauré en Grèce.

 

L'organisation de la phalange

La phalange grecque était une formation en colonne, constituée de soldats d'infanterie lourde armés de lances ou de piques, et d'épées.

    Les piques, qui mesuraient entre 1, 80 m et 2 m, étaient beaucoup plus longues que les lances du passé. Les soldats des phalanges portaient un bouclier rond appelé hoplon, lequel donna leur nom aux soldats d'infanterie : les hoplites. Ceux-ci portaient une armure de métal qui leur couvrait au moins le torse, les avant-bras et les tibias, ainsi qu'un heaume de métal qui leur protégeait la tête et l'encolure.

C'est grâce à cette armure qu'ils furent classés dans l'infanterie lourde, par opposition à l'infanterie légère qui ne portait qu'une armure réduite ou pas d'armure du tout.

Une unité de phalange comptait dix hommes au premier rang et dix hommes en profondeur, mais les unités de ce genre étaient généralement réunies en grand nombre pour former un contingent plus important.

 

La phalange au combat

La phalange était une formation d'infanterie offensive destinée au combat mano a mano en choc frontal. Elle combattait le plus souvent sans aucun renfort de troupes légères ou de cavalerie, ce qui constituait certainement un handicap majeur, mais les Grecs ignoraient pratiquement tout des troupes auxiliaires. Tant que les combats furent homogènes, l'absence de troupes de jet et de cavalerie ne fut pas problématique.

Lors de la bataille, les troupes d'infanterie lourde des deux camps se rapprochaient les unes des autres à un rythme soutenu, tout en restant formées. Lorsque les phalanges adverses se rejoignaient, les premiers rangs baissaient leurs piques et les deux camps chargeaient, tentant de porter leurs coups contre une zone sans protection des rangs adverses. Les piques qui pointaient à l'avant pouvaient provenir des rangs arrières. Les hommes du premier rang adverse étaient donc assaillis par plusieurs lances.

 

Les armées grecques de la période allant de 700 à 400 av. J.-C. sont peut-être les seules de l'histoire à avoir compté exclusivement sur la tactique du choc frontal. L'affrontement des phalanges se résumait au combat au corps à corps.

La cité-État de Sparte fut le maître incontesté de cette tactique. L'état dans son entier était organisé comme un camp militaire. Tous les hommes, hormis les esclaves, servaient dans les phalanges de Sparte et s'entraînaient sans cesse.

Comme les hoplites portaient leur bouclier au bras gauche, la phalange était plus exposée sur son flanc droit. C'est pourquoi les meilleurs unités étaient normalement postées sur le côté droit de l'armée. L'enjeu des batailles était souvent de voir laquelle des deux armées en présence détruirait l'aile gauche de l'autre avec son aile droite.

Les armées de phalanges étaient soumises, sur leur flanc droit et leurs arrières, aux tirs et aux attaques de cavalerie du camp adverse, mais uniquement si l'ennemi disposait de ce type d'unités et décidait de les employer.

La tactique de la phalange parvint à son apogée lors des deux grandes guerres qui marquèrent le Ve siècle : la guerre contre la Perse au début du siècle, et la guerre du Péloponnèse vers la fin du siècle. Dans ces deux conflits, les forces navales jouèrent un grand rôle, mais les phalanges restèrent au centre des combats terrestres.

 

La phalange dans la guerre

La guerre du Péloponnèse fut un conflit civil interne à la Grèce au cours duquel les Athéniens, tournés vers la mer, disputèrent à la Ligue spartiate, basée à terre, la domination du pays.

L'un des enseignements majeurs de cette guerre fut que la phalange n'était pas autonome sur le plan stratégique. L'infanterie lourde ne pouvait à elle seule prendre une cité lorsqu'elle avait emporté les combats à l'extérieur des murs.

La guerre contre la Perse eut pour principal intérêt de placer la phalange grecque, unité d'infanterie lourde qui se distinguait par son excellence dans le monde de l'époque, face à une armée intégrée constituée d'unités d'infanterie, de troupes d'escarmouche et de cavalerie.

Les Perses et les Assyriens renforçaient déjà leur infanterie avec des troupes auxiliaires de toutes sortes. Ils étaient aussi passés maîtres dans l'art de la guerre de siège.

Les deux grandes batailles terrestres de la guerre contre la Perse se déroulèrent à Marathon en 490 av. J.-C. et à Platée en 479 av. J.-C. À l'issue de ces deux batailles, l'armée grecque, plus petite et constituée presque entièrement de troupes d'infanterie lourde, emporta la victoire.

Les historiens conviennent généralement que la discipline et l'entraînement des Grecs furent pour beaucoup dans ces résultats, mais admettent aussi que les erreurs et l'incompétence des Perses en furent au moins partiellement responsables.

Dans l'une et l'autre batailles, les Perses disposaient de troupes légères et d'unités de cavalerie substantielles qui auraient dû s'avérer efficaces contre les formations compactes des phalanges.

À Platée, l'armée perse comptait 10 000 cavaliers, par exemple. Dans les deux batailles, cependant, les troupes auxiliaires ont été peu exploitées et peu efficaces, ce qui a permis à l'infanterie lourde des Grecs de vaincre l'infanterie perse plus faible et ainsi d'emporter la victoire.

L'infanterie lourde des Grecs est arrivée au moment du choc frontal avec un moral quasiment intact. Au cours de l'affrontement des deux infanterie, les Grecs sont parvenus à écraser l'infanterie perse et à la mettre en déroute.

Les Grecs ont tenu bon jusqu'à une période assez tardive du IVe siècle avant de convertir leurs armées d'infanterie lourde en armées intégrées.

Malgré l'accumulation des faits accusant le handicap des phalanges lorsqu'elles se retrouvaient face à des hommes d'escarmouche et encerclées par des troupes de cavalerie, le concept de phalange était une composante trop importante de leur culture.

Les phalanges avaient gagné la guerre contre les Perses, avec l'aide de la flotte, et l'infanterie lourde grecque se distinguait sur les territoires environnants par l'excellence de ses mercenaires.

Il fallut attendre que la faiblesse du système ne fasse plus aucun doute pour qu'il soit abandonné. La démonstration en fut faite par des troupes d'invasion macédoniennes conduites par Philippe, le père d'Alexandre le Grand.